« Ça tape fort aujourd’hui ! » Il est 10 heures et Armand Renard se cherche en vain un chapeau, sur la toiture du gymnase Jean Dame. Sous le soleil brûlant, trois jardiniers transpirent à grosses gouttes, binette à la main : Armand, Thibault et François ; tous trois appartiennent à l’association Toits vivants. Haut-perché au-dessus des salles de sport, leur large toit terrasse de 750 m2 vient d'être inauguré.
À la droite de l’entrée, de larges bacs
emplis de terre attendent en effet les futurs jardiniers volontaires. Pour lui
et son association, l’agriculture urbaine est loin de ne présenter qu’une seule
visée productive :« Mettre les gens au contact des
plantes, les mains dans la terre, c’est aussi important que de produire »,
explique le jeune cofondateur des Toits vivants.
Depuis leur arrivée dans le quartier, la
curiosité est au rendez-vous - les plus impatients, ce sont sans doute « les
voisins », qui par-dessus la rue, observent avec attention l’avancée
des travaux… Ce matin, c’est Florence, qui apparaît derrière une fenêtre de
l’immeuble d’en face. S’ensuit un dialogue hurlé de part et d’autre de la voie : « Avant
dimanche, je t’envoie un message » crie Armand, amusé.
Car sur la gauche, une fois passé le
local technique, un véritable champ se dévoile à la vue. L’endroit
possède une particularité : une très faible épaisseur de substrat, à peine
12 centimètres de terre posés sur bâche. Ici, les 150 kg/m2 de portance
seulement demandent aux agriculteurs du lieu prudence et ingéniosité : « En temps normal, on ne cultive pas de jardin sur de telles surfaces, précise Armand. Pour nous, démontrer que l’on peut cultiver des
légumes sur de telles toitures est un challenge qui pourrait à l’avenir changer
la destinée de bien des toits plats. »
Pour l’heure, l’essai semble plutôt bien
débuter, constatent ses jardiniers. Pieds de tomates, plants de courgettes et
parmi les jeunes pousses dont la croissance commence, de larges fleurs oranges,
celles des courges, florissantes ! « C’est une très
bonne surprise, se félicite-t-on, même dans aussi peu
de substrat, elles semblent vraiment se plaire ici. » Pour la récolte,
il faudra cependant patienter. Si une partie sera distribuée aux habitants,
l’association est encore en quête d’amateurs de bons plants : « Nous
aimerions vraiment établir un partenariat avec un restaurateur : nous
cherchons donc un chef engagé, qui apprécie les produits locaux de
qualité », conclut Armand.
En attendant, il reste encore aux mains
vertes de Toits vivants la mise en place du troisième volet du projet :
objectif recherche, avec le test de la culture sur drèches, ces résidus de
brassage des céréales récupérés dans les brasseries. Etalées dans les bacs,
les fines particules jaunes y libèrent une étonnante odeur de bière.